L'Apprenti salaud
Antoine n’aurait jamais pensé escroquer quiconque s’il n’avait hérité. Et s’il n’avait croisé et voulu éblouir Caroline en s’inventant un personnage. Antoine et Caroline ont en commun l’imagination et le goût du jeu, la naïveté et l’audace.
Et la maladresse… Plus Laurel et Hardy que Tristan et Iseult, ils ont choisi délibérément une vie et des amours irréalistes, et sans avenir possible.
Robert Lamoureux / Christine Dejoux/ Georges Wilson / Claude Piéplu / Jacques Doniol-Valcroze / Jean-Pierre Kalfon / Claude Marcault
Adaptation, dialogues et réalisation Michel Deville d’après « Bien mal acquis» de Franck Néville, éditions Presses de la cité
Lumière Claude Lecomte
Cadre Robert Foucard
Montage Raymonde Guyot
Son René Magnol
Musique Georges Bizet
Compléments
• LE FILOU ET L'AGNEAU (25 mn)
Entretiens avec Christine Dejoux, Robert Lamoureux (INA), Michel Deville
• ROSALINDE VUE PAR... (48 mn)
Christine Dejoux, Albert Dupontel, Patrick Bruel, Patrick Chesnais, Jean-Hugues Anglade, Thierry Leproust, Philippe Lioret, Michel Deville
• FILM ANNONCE
Nouveau master numérique Haute Définition • 1h33 • Format du film respecté 1.66 16/9 compatible 4/3 • Son mono 2.0 • Version originale française
© 1977 Les Productions Traversières – Éléfilm • Photos © Michel Deville
© 2009 Gaumont Vidéo EDV 1504 / Éléfilm EDV 2026
EXTRAITS CRITIQUES
L’Apprenti salaud : Un expert en mensonges
(…) Deville est le cinéaste du mouvement, il en devient presque abstrait. Cette précipitation raffinée, cet art souverain des liaisons et des sautes d’humeur le caractérisent. Sa recherche est celle du rythme de la comédie, où tout bascule et change. Son montage est presque exclusivement fondé sur l’ellipse, les décors s’escamotent quand les conversations continuent, les conversations s’enchaînent malgré les sautes de temps et de lieu. On passe sans transition du jour à la nuit, rien ne se fixe, on pourrait parler d’un montage en déséquilibre, vers l’avant, courant toujours plus vite pour ne pas s’effondrer et s’arrêter.
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Les comédiens eux-mêmes sont dirigés sans cesse dans le mouvement, Lamoureux avec sa marche précipitée et chaloupée, Dejoux et sa façon de courir, de tourner autour de son partenaire. On ne s’étonnera pas de les voir se déguiser sans cesse. Et quand ils s’embrassent, c’est dans un ascenseur qui monte et descend…
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Sans cesse, l’amour, la tendresse, la cupidité, l’égoïsme, l’insouciance s’opposent. Chaque personnage passe de la tendresse à la cupidité, de l’égoïsme à l’amour, de la facétie à la gravité. Et comme le couple central n’est pas animé au même moment des mêmes sentiments, il s’ensuit une sorte de scintillement dramatique, d’effet kaléidoscopique assez surprenant. L’invention est permanente. Lorsque enfin leurs sentiments se stabilisent, Deville peut afficher le mot « fin ».
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Les dialogues fusent, ruissellent, se précipitent en coq-à-l’âne ou en à-peu-près. On a vraiment le sentiment que les personnages sont libres de dire n’importe quoi n’importe quand. Le dialogue n’est pas là pour expliciter les caractères et faire avancer l’action. Il la détourne, au contraire, lui fait faire marche arrière ou l’accélère inconsidérément. Lorsqu’il faut bien que l’un deux s’apaise pour apprendre quelque chose à l’autre, la caméra est avec celui qui écoute, ne sait pas, réagit, hésite. En un mot, qui bouge.
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La musique tient toujours chez Deville un rôle entraînant. Les différents thèmes de Bizet forment autant de leitmotiv ou de contrepoint venant briser l’action, la souligner, la moquer ou la démentir. Ils donnent même à Deville l’occasion d’inventer de véritables gags musicaux, L’Arlésienne venant prédire un départ inattendu… On ne sait plus si la logique de l’intrigue entraîne les personnages, si c’est la musique qui conduit l’action, tout est pris dans un doute absolu, une confusion, un tournis. Le risque surgit quand récit et personnages deviennent plus clairs et plus plats, les sentiments plus convenus. Le film s’essouffle un peu dans sa dernière partie.
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Le Deville de la comédie pure (Adorable menteuse, L’Ours et la poupée) m’intéresse davantage que celui de la comédie dramatique. Dans le premier cas, nous sommes complices. Dans l’autre, son univers abstrait prétend à un pathétique qu’il ne peut tout à fait assumer. Les films restent des mensonges, mais des mensonges trop jolis et inavoués. Ce qui fait la valeur de L’Apprenti salaud, ce sont ces clins d’œil incessants, cette mise en scène qui se moque d’elle-même, se démasque : arrêts sur images, comédiens s’adressant à la caméra… Deville nous prend à témoin de ses mensonges, il témoigne donc d’une lucidité réconfortante. Comme son héros, il est un illusionniste, un escroc – et le revendique. Il n’a pas tort d’en être fier !