Benjamin
ou les mémoires d'un puceau
Benjamin a dix-sept ans et ne connaît que son vieux serviteur Camille et la solitude du château délabré de ses ancêtres. Camille et Benjamin décident de partir chez la tante de Benjamin, la riche, douce et épanouie Comtesse de Valandry. L’ami de la comtesse est séduisant et libertin, sa très jeune et très belle voisine est orpheline.
Benjamin raconte l’apprentissage de l’amoralité. Comment un innocent perd son innocence. Comment une ingénue découvre le pouvoir de la séduction. Comment un cynique perd son cynisme. Ou comment la sincérité peut être tragique, et la déchéance joyeuse…
Pierre Clémenti / Catherine Deneuve / Michel Piccoli / Michèle Morgan/ Odile Versois / Francine Bergé / Catherine Rouvel / Anna Gaël / Jacques Dufilho
Réalisation Michel Deville
Scénario Nina Companeez et Michel Deville
Dialogues Nina Companeez
Production Mag Bodard
Lumière Ghislain Cloquet
Cadre Robert Foucard
Montage Nina Companeez
Décors Claude Pignot
Son André Hervée
Musique Luigi Boccherini, Joseph Haydn, Wolfgang Amadeus Mozart, Jean-Philippe Rameau, Jean Wiener
Compléments
• BENJAMIN, NINA ET LES DEUX MICHEL (29 mn)
Entretiens avec Nina Companeez, Michel Piccoli, Michel Deville
• FAIRE UN FILM
Filmer l’initiation amoureuse (15 mn)
• FILM ANNONCE
Nouveau master numérique Haute Définition • 1h43 • Format du film respecté 1.66 16/9 compatible 4/3 • Son mono restauré 2.0 • Version originale française
© 1968 Films Paramount – Ciné Mag Bodard – Éléfilm
© 2008 Gaumont Vidéo EDV 1504 / Éléfilm EDV 2026
EXTRAITS CRITIQUES
Texte, image, musique participent à l’exquise réussite de ce film. Avec, sans doute, un imprévisible bonheur, une grâce de surcroît, ceux-là mêmes qui, dans l’œuvre de Jean Renoir, par exemple, donnent à jamais ce charme singulier, sa puissance d’envoûtement à La Règle du jeu. Après un début plaisant mais facile, l’émerveillement se produit, alors que s’ouvre une fête champêtre et galante. Voici un certain dix-huitième siècle comme matérialisé devant nous, comme si nous y participions. Et Mozart, le fils après le père, et Haydn, et Boccherini ajoutent au plaisir du regard leurs joies subtiles. Quant au langage…
Ah ! le langage. De même que ces images dépassent l’imagerie, ces phrases transcendent le pastiche. Michel Deville et Nina Companeez ne se sont pas inspirés d’un texte préexistant. Ils ont tout inventé, réinventé. Nous sommes en pays de connaissance et ne reconnaissons rien. Est-il possible, vraiment, que Nina Companeez, avec la seule collaboration de Michel Deville, ait écrit ce chef-d’œuvre ? Nous connaissions leur talent, ce n’est pas d’aujourd’hui qu’ils collaborent, mais un seuil a été franchi. Si grands que fussent leurs dons, on ne pouvait espérer qu’ils atteignent cette évidente perfection.
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Ils sont les instruments et les auteurs de ce miracle : antennes vivantes orientées vers un certain passé et ayant su capter les ondes du temps par leur talent et leur culture, en toute conscience et affinité. Michel Deville et Nina Companeez n’avaient pas besoin de copier un langage dont ils étaient imprégnés. Ni de singer un état d’esprit, dont ils avaient peut-être la nostalgie et l’expérience. Je ne parle point du libertinage, mais d’un art d’accepter les plaisirs et le tragique de la vie. Pas tant le plaisir que le bonheur, un certain bonheur. Le bonheur ? Il n’est point sûr, il entre trop de gravité sous cette apparente frivolité. Ce que nous rendent sensible, admirablement, Michèle Morgan et Michel Piccoli, Catherine Deneuve et Pierre Clémenti.
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Michèle Morgan si pathétiquement belle, et faisant bon visage face à l’inéluctable, ce qui est encore une façon d’être belle. Ce n’est point du côté de Laclos qu’il faut la chercher, plutôt chez Marivaux. Ou mieux encore dans les mémoires du temps : « Je la trouvais charmante, de ce charme à l’épreuve du temps… ». Ainsi Jean-Jacques parle-t-il de la maréchale de Luxembourg.
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Michel Piccoli. Plus Valmont que Don Juan, avec une distance entre son personnage et lui, entre lui et lui-même. Vulnérable, enfin, et vaincu. Séducteur séduit. Bourreau mis à mort, et sauvé. Catherine Deneuve, ingénue et perverse, rayonnante de beauté et de jeunesse, mais comme transfigurée par l’expérience de la souffrance. Pierre Clémenti, et sa beauté enfin située, ne se satisfaisant pas de son évidence, prenant enfin son sens, inoubliable Benjamin. Parmi tant de jolies filles si généreusement dénudées, il faut féliciter Francine Bergé, spirituelle, aiguë. Les charmantes Anna Gaël et Catherine Rouvel, Odile Versois délicieuse. Jacques Dufilho, enfin, est excellent, presque émouvant.
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Cette éducation sentimentale libertine ne nous toucherait pas autant si elle ne concernait notre temps. Auteurs et acteurs appartiennent pour une part non négligeable au dix-huitième siècle. Mais leurs personnages font le même chemin dans l’autre sens. Sous leurs atours et dans leurs amours, ils rejoignent notre présent.